Article Les Echos : quelques corrections nécessaires…
Dans ses pages « Entrepreneurs », Les Echos ont souhaité faire un focus sur les acteurs de la transition énergétique. J’ai pu en profiter pour faire passer quelques idées qui me sont chères. Le sujet est complexe, et le journaliste n’a pas forcément bien restitué tous les messages. Voici le verbatim initial corrigé.
Depuis 1979, le cabinet Nepsen accompagne collectivités, entreprises industrielles et bailleurs dans leurs stratégies d’économie d’énergie. Ses ingénieurs “éconergéticiens”, comme les présente l’entreprise, proposent essentiellement de la maîtrise d’œuvre de réhabilitation, des audits et de l’aide à la décision pour les stratégies immobilières et, depuis 6 ans, des bilans et stratégies carbone.
Si le groupe est en croissance, avec 12 millions d’euros de chiffres d’affaires réalisés en 2021, son président Alexandre Sevenet assure que c’est loin d’être dû à une prise de conscience écologique de ses clients.
L’inflation met les entreprises au pied du mur
“ Certes, la sensibilisation à la responsabilité environnementale est un terreau fertile, mais seuls 15 à 20% de nos clients sont motivés en premier lieu par cela. Pour tous les autres, c’est bien la pression réglementaire et la menace économique qui sont des déclencheurs. Depuis six mois par exemple, l’inflation galopante des prix de l’énergie génère une hausse galopante des demandes, car la survie des entreprises est en jeu ! ”.
Même des économies sur la facture de 20 à30%, garanties par les ingénieurs de Nepsen, peinent à convaincre leurs clients si l’amortissement du coût des travaux dépasse quatre ans. Sauf situation de crise, les industriels attendent des retours sur investissements sur deux, voire un an.
“ Nous avons par exemple réalisé une étude de faisabilité il y a quatre ans sur l’une des usines d’un industriel verrier, à qui nous avions proposé un plan permettant de réduire de 50% leur consommation énergétique sur une partie du process, avec un retour sur investissement sur 7 ans. Eux souhaitaient un retour en trois ans maximum. Résultat : cette usine est actuellement fermée en raison des coûts de l’énergie ”.
Transition énergétique: des réglementations trop peu contrôlées
Et même les nouvelles réglementations, comme la RE 2020 pour les nouveaux bâtiments, pourtant l’une des plus ambitieuses au monde selon Alexandre Sevenet, ne mène pas à des résultats concrets, car elles ne sont tout bonnement pas suffisamment appliquées. S’il reconnaît toutefois que certains acteurs, comme les collectivités et bailleurs sociaux – qui reçoivent des financements d’Etat sur ces sujets – sont volontaristes ou du moins se conforment réellement à la réglementation, Alexandre Sevenet milite pour plus de contrôles et de sanctions.
“ Les permis de construire, les études thermiques et même les stratégies carbone ne sont pas contrôlées. Quand un employé de mairie reçoit une demande de permis de construire, il regarde les chiffres en bas de page mais n’a que rarement les compétences pour savoir s’ils ne sont pas fantaisistes. Je ne serais pas surpris d’apprendre que seules 70% des constructions neuves sont réellement conformes à la RE 2020! ”.
Car les ingénieurs de Nepsen sont confrontés tous les jours à des clients qui ont un budget fixé par avance pour leur travaux, et n’ont pas les moyens de porter des opérations ambitieuses, quitte parfois à tuer le gisement de futures économies d’énergie. Seule la promesse de subventions, réduisant drastiquement le coût d’investissement, peut finalement les convaincre d’aller plus loin. Ainsi, alors que la clientèle historique de Nepsen est à 80% publique, Alexandre Sevenet assure que le dispositif MaPrimeRénov’ lui a par exemple permis de capter de plus en plus de bailleurs privés.
Outre le manque d’engagement des entreprises, Alexandre Sevenet tient à souligner un autre frein au développement de Nepsen. Alors que l’entreprise compte 180 salariés, 25 postes d’ingénieurs spécialisés en transition écologique sont ouverts, qui ne trouvent pas preneurs. “Il n’y a pas assez de formation, et surtout pas assez de possibilités de reconversion”, estime-t-il. Il assure ainsi recevoir des candidatures d’ingénieurs expérimentés dans d’autres domaines, prêts à baisser leur rémunération, mais pas suffisamment pour des profils juniors dans le domaine.